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Protéger les enfants palestiniens des colons Témoignages de Denis COSTIL, observateur ‘EAPPI’ à Jérusalem

dimanche 21 juillet 2013, Par Le Collectif 69

DENIS COSTIL, OBSERVATEUR ‘EAPPI’ A JERUSALEM

Originaire de Lyon, Denis Costil, vient d’arriver à Jérusalem dans le cadre du programme d’envoi d’observateurs sur la frontière israélo-palestinienne mis en place par le Conseil Œcuménique des Églises

EAPPI  : Ecumenical Accompaniment Program in Palestine and Israel

Nous publions ses lettres de Palestine.

7 juillet 2013 - Quatrième lettre de témoignage de Denis Costil

Dans mes lettres précédentes, j’ai parlé de la situation à Jérusalem telle que j’ai pu en prendre connaissance à travers ce que j’ai vu ou lu ou entendu : très souvent, j’ai noté que « A Jérusalem, c’est particulier ».

L’organisation du séjour des accompagnateurs EAPPI permet de visiter deux autres lieux où sont implantées des équipes sur le terrain. J’ai choisi d’aller une fois dans le sud de la Palestine, avec l’équipe de Yatta, dans les collines au sud d’Hébron, et une fois dans le nord, à Yanoun (10 à 15 km de la ville de Nablus).

Je vais ici décrire deux des épisodes vécus avec ces équipes, puis décrire le document Kairos des Eglises de Palestine, et enfin arriver à la conclusion de ces quatre lettres d’un EAPPI à Jérusalem.

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20 juin 2013 - Troisième lettre de témoignage de Denis Costil

Se déplacer ! Il faut pour cela, au moins un terrain, une liberté de mouvements, et … des papiers en règles... J’ai choisi ce sujet car « du coté israélien, les jeunes ne demandent que le statu quo, puisque la paix armée règne à peu près, et ce malgré les difficultés économiques. Les jeunes palestiniens se posent beaucoup de questions, mais l’une de leurs préoccupations est de pouvoir circuler librement ». Cela m’a été dit, lors d’une rencontre, par une journaliste, travaillant, entre autres, pour « Témoignage Chrétien ».

Je devrais donc parler de l’organisation territoriale, des systèmes de contrôle mis en place par l’armée, et de la libre circulation des personnes en territoires d’Israël, de Cisjordanie et de Jérusalem...

Mais tout cela est horriblement compliqué… je ne connais que peu de choses ! Et donc je donnerai principalement des informations et des témoignages sur Jérusalem, même si pour mieux comprendre, il faut regarder la situation d’un peu plus haut.

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23 mai 2013 - Deuxième lettre de témoignage de Denis Costil

 ; Denis Costil est en mission d’observation sur la frontière israélo-palestinienne de Jérusalem-Est, dans le cadre du programme EAPPI coordonné par le Conseil œcuménique des Eglises.

HOME, SWEET HOME...

Sweet home ! S’il est une première chose que recherche chacun, à tout âge, c’est bien un logement, et, en France, on le sait bien ! C’est la raison pour laquelle je décris dans cette lettre l’un des principaux problèmes à Jérusalem pour les palestiniens : se loger et garder son logement.

- Quelques données :

En 2010, la population de Jérusalem est de 788 000 habitants, dont 504 000 israéliens (64%) et 284 000 palestiniens (36%). Mais la proportion sur la seule partie annexée est de 39% d’israéliens pour 61% de palestiniens.

Un tel déséquilibre de population semble insupportable aux israéliens qui font tout pour le redresser : Ainsi, environ 35% de la surface de Jérusalem-est ont été expropriés et constituent des enclaves de colonies juives : 200 000 « settlers » (ou colons, nom donné à ces israéliens qui viennent habiter en Palestine), habitent ainsi en terres conquises en 1967.

Environ 2 000 colons habitent au cœur des quartiers palestiniens de Jérusalem, après réquisition des habitations par divers moyens. Après diverses décisions des autorités, il ne reste plus que 13% de la surface disponible pour les palestiniens.

Aujourd’hui, il est quasi impossible à un palestinien de construire « légalement » : il est extrêmement difficile et coûteux d’obtenir un permis : 94% des permis déposés sont refusés, seule une moyenne de 150 permis de construire est délivrée chaque année. En conséquence, pour loger une famille qui s’agrandit, beaucoup de palestiniens, construisent ou agrandissent leur maison illégalement.

On estime à 22 000 le nombre de telles habitations, soit autour de 40% des habitations existantes. Logements illégaux, donc susceptibles de démolition ou d’éviction.

Ainsi, le nombre de logements palestiniens détruits à Jérusalem-est est donné ci-dessous : (j’ai noté 4 références pour montrer la difficulté d’avoir des chiffres !)

- Comment en est-on arrivé là ?

Après la 2nde guerre mondiale, en 1948, l’indépendance de l’État d’Israël est proclamée, environ 700 000 palestiniens quittent - ou sont obligés de quitter - leur logement et partent, certains à Jérusalem. La ville est partagée en deux parties : israélienne (à l’ouest) et Jordanienne à l’est (dont toute la « Old city » cœur de la ville, entourée par les murailles).

En 1967, à la suite de la guerre des Six Jours, Israël prend le contrôle de l’ensemble de Jérusalem. La municipalité est largement agrandie (de 5,5 à 71 Km², le maximum de surface pour minimiser la proportion de palestiniens) par annexion de nombreux villages autour de Jérusalem.

Cette annexion est jugée illégale par la communauté internationale des Nations unies. La construction de nombreuses colonies israéliennes, elles aussi illégales, est autorisée (15 colonies depuis 1967), tout cela par volonté politique affichée de maintenir une proportion de l’ordre de 30% de palestiniens.

Cette volonté politique de « judaïser » Jérusalem est approuvée par le gouvernement en 2010 (« capitale juive unie »), décision encore une fois qualifiée d’illégale par les Nations unies.

Dès lors, parmi les mesures prises, figurent les expulsions et démolitions de logements. Depuis que nous sommes en place à Jérusalem, (un peu plus de 3 semaines), nous avons rédigé 7 rapports d’incidents concernant des démolitions de maison, ou de partie de maison, sur les 12 rapports d’incidents envoyés.

Deux exemples : J’ai plutôt choisi de commencer par décrire la situation d’un quartier complet qui est suivi par les équipes EAPPI successives depuis 5 ou 6 ans : le quartier de Sheikh Jarrah. Puis je citerai l’histoire d’une famille de Jérusalem.

- HISTOIRE D’UN QUARTIER : SHEIK JARRAH

Le quartier de Sheik Jarrah est dans la partie palestinienne de Jérusalem, par rapport à la « green line » (frontière de 1949, reconnue internationalement) : donc en territoire occupé, disent les palestiniens, ou en territoire annexé disent les israéliens. Il est situé à 2km au nord du cœur de la ville, la « Old city ». Il est limité au nord par deux quartiers de colons israéliens ; à l’ouest il jouxte la partie israélienne de Jérusalem (Ouest Jérusalem). Vers l’est, le mur de séparation est à 2km ; au-delà du mur, se trouvent (en zone palestinienne !) deux très grosses colonies : Ma’ale Adumin et plus loin vers le nord-est Misho Adumin. Il reste une quinzaine de km vers l’est pour atteindre la mer morte : ils sont utilisés pour l’agriculture des settlers israéliens.

D’où son importance stratégique, dans la politique israélienne qui a pour but de récupérer l’ensemble de Jérusalem, « leur » capitale, en ceinturant la Old city de quartiers occupés par des israéliens, isolant ainsi Jérusalem de la Palestine, d’une part ; et en coupant la Palestine en deux parties l’une au nord et l’autre au sud, d’autre part.

- Témoignage :

Mohamad Sabbah raconte : « Ma famille était installée depuis des générations à Jaffa. En1948, nous sommes expulsés de notre maison » – superbe d’ailleurs, j’ai vu les photos – « puis on nous octroie le statut de réfugiés ».

En 1956, L’UNRWA [1] finance la construction de 28 maisons sur des terrains cédés par le gouvernement jordanien. La famille Sabbah fait partie des 28 familles palestiniennes, réfugiées depuis 1948 qui s’installent ainsi à Sheik Jarrah. En échange, les familles renoncent à leur statut de réfugiés, doivent payer une location pendant trois ans, et obtenir un titre de propriété : titre qu’ils n’ont jamais obtenu des jordaniens...

Avoir un titre de propriété est souvent un grand problème : Sous le régime ottoman, jusqu’en 1916, les terres n’étaient que « louées » par les familles. Depuis lors, il ne s’est rien passé de significatif à Jérusalem- Est.

Le nom de la famille de Mohammed Sabbagh est cité en justice pour la 1ere fois en 1972, par des associations israéliennes de settlers qui prétendent être propriétaires de terrains sur la foi d’un document tendant à prouver une « certaine forme » de propriété. La cour de justice déboute, par ailleurs, les settlers d’une autre demande d’expropriation sur 4 maisons - doutes concernant l’authenticité des documents. Dans les années qui suivent, les 28 familles reçoivent régulièrement des demandes de paiement ou d’évictions...ce qui les oblige à se lancer dans des procédures légales longues et coûteuses.

En1982 survient un épisode important : 23 familles sont défendues par un avocat qui prend la liberté, sans l’accord des familles, de conclure un accord – dit aujourd’hui Agrément Toussia-Cohen : il reconnaît, aux settlers la propriété des terrains, et aux familles le droit de rester sur place, moyennant le paiement d’un « loyer »... sans garantie de non éviction ! Les familles refusent évidemment, mais cet agrément constitue un précédent qui va être utilisé constamment par la suite.

Les difficultés continuent. Dans les années 90, interminables procédures de justice...et en1999, 1ere éviction : grosse amende, scellement d’une partie rénovée de la maison, dans laquelle s’installent peu après des settlers israéliens. 9 familles palestiniennes vont ensuite recevoir des ordres d’expulsions émanant de la cour ou des avocats des settlers.

En 2009, au milieu de la nuit, la porte d’entrée de la maison d’un autre palestinien Mohammad Al-Kurd est défoncée ; la police “lourdement armée et masquée”, vide la maison après avoir cerné le quartier. Mohammad, malade, en fauteuil roulant, est atteint d’une crise cardiaque. L’ambulance est bloquée par la police, il décède quelques jours plus tard d’une seconde crise. Fawzyeh, son épouse, en signe de protestation, s’installe dans une tente, régulièrement démolie par la police.

La même année, deux autres familles sont forcées à partir et s’installent en face de leur maison, dans des tentes pendant un certain temps.

La famille Al-Kurd vit aujourd’hui dans la partie ancienne de sa maison : dans la partie rénovée de la maison, alors construite sans permis et évacuée de force, vit un juif extrémiste venant de Chicago, parlant très mal l’hébreu m’a-t-on dit, mais je l‘ai vu passer avec sa tenue noire, et son chapeau, lui aussi noir ...

Ces affaires, menées avec violence par la police et les settlers, font alors du bruit, et Sheik Jarrah commence à être défendu par des associations israéliennes des droits de l’homme, et la presse internationale. Nombreux sont alors les étrangers qui viennent après la sortie d’un court métrage « My neighbourhood », remarquable, sur l’action non violente au cœur de ce quartier de Jérusalem.

Parmi les personnalités, Avram Burg ancien porte-parole de la Knesset, l’ancien président des USA Jimmy Carter, l’ancien président de l’Irlande Mary Robinson sont passés pour connaître la situation.

Il semble que la présence politique de telles personnalités, et les réactions politiques ont alors « calmé » la police, qui n’est plus intervenue depuis lors, alors que chaque vendredi continue à se tenir une manifestation à Sheik Jarrah ; elle n’a plus la force des années 2008/ 2010, mais rassemble encore du monde – vendredi dernier, nous étions plus de 200.

Par ailleurs, la cour de justice a demandé aux associations juives de prouver la véracité de leurs documents : les affaires semblent gelées jusqu’à la fourniture de cette preuve, repoussée par les avocats jusqu’à aujourd’hui.

« Au début, c’était difficile, mais maintenant nous avons l’habitude, et si nous partons, nous perdons les maisons pour lesquelles nous nous battons depuis si longtemps ! Et nous perdons aussi notre ID

. Si on gagne, cela servira de jurisprudence à beaucoup de familles qui attendent, ailleurs », nous dit Mohamed Sabbah. Voila un bel exemple de résistance collective non violente qui a permis à ce quartier de continuer à vivre – mais dans quelles conditions de tension, de crainte ! – malgré tout.

Pour combien de temps ? Récemment une famille a reçu un nouvel ordre de démolition, son cas passe, dans quelques jours, devant la cour de justice. Notre présence est réclamée, car la présence d’ « internationaux » peut faire changer la décision des juges...

Enfin, hier à l’entrée du quartier, surprise : en face du carrefour d’où partent les manifestations, se trouve un grand terrain et un hangar qui ont permis à M. Mohammad Joulya de monter une affaire de vente de voitures. Il avait été approché par la municipalité pour quitter et/ou vendre ce terrain, afin de construire un parking pour les juifs habitants dans le secteur (il n’y en a pas beaucoup...).

Devant son refus, un ordre de démolition a été émis, sans date. Hier en fin de nuit, les voitures sur le terrain ont été emmenées, les installations complètement détruites ...

Les difficultés de logement, et la volonté politique expliquent ces nombreux cas d’expulsion ou de démolition de maison, de violences, et d’intimidations ... que nous suivons tant le problème est primordial : nous partons rencontrer la famille, leur faire raconter l’histoire le plus précisément possible, avec nom, heures des événements, problèmes... nous prévenons, si c’est utile et possible les associations ou organismes qui peuvent aider les familles. Puis nous rédigeons un rapport d’incident qui alimentera les informations des organisations en témoignages directs, puisque EAPPI est reconnue comme le plus présent sur le terrain.

Mais aussi, et peut-être sommes nous les seuls à faire cela - en allant passer régulièrement du temps avec ces familles, au cours des jours suivants : « Oui, [telle ou telle organisation] est venue le 1er jour, puis nous n’avons plus vu personne, et souvent rien n’a été fait... », nous dit-on souvent.

Et c’est un réconfort certain pour ces familles. Je suis encore étonné quand en arrivant à Sheik Jarrah, beaucoup nous disent un chaleureux bonjour ! Nous avons pris le café dans plusieurs des maisons des familles citées.

- HISTOIRE D’UNE FAMILLE A JERUSALEM :

Pour finir, un autre exemple de situation difficile. Nous recevons un appel : Une nouvelle démolition...

Après leur mariage, les époux S. s’installent dans un studio, dans un immeuble. Arrivent les enfants, et il faut plus de place : ils construisent - évidemment sans permis, voir ci-dessus, une maison sur le toit plat du dit immeuble. Depuis plusieurs années (17 ans !), leur avocat avait réussi à repousser la décision ; cette fois ci, non : la famille a reçu l’ordre de démolition avec une date limite au 18 mai.

M. Nader S. a pris sa masse et a détruit les murs lui-même...Par crainte d’aller en prison, comme la police l’en a menacé, pour ne pas payer le cout de la démolition (eh, oui, il faut payer cela !), ou par dépit...La famille utilise une pièce qui n’a pas été détruite, et a monté une sorte de tente à coté sur le toit...

Depuis, nous avons soutenu cette famille en la mettant en liaison avec les institutions qui peuvent l’aider, mais surtout, deux jours plus tard, j’ai moi-même passé près d’une heure et demi à écouter la mère de famille (6 enfants, de 25 à 11 ans), qui avait besoin de parler de sa vie, de sa ville - elle est partie étudier aux USA, a exercé le métier de journaliste, et se retrouve ainsi, sans rien... « Pour moi, cela n’a pas d’importance, mais quel avenir ont mes enfants dans mon pays où je me sens plus étrangère que je ne serais étrangère dans un autre pays ? » Ainsi elle songe vraiment à émigrer...à l’étranger, car partir en Palestine revient, avec les lois israéliennes actuelles, à perdre sa carte d’identité jérusalémite, et donc, entre autres, ne plus pouvoir se déplacer librement pour revenir dans sa ville...

« J’accepte les lois israéliennes si elles sont justes. Nous sommes des humains, non ? Je vais lutter, sans violence mais jusqu’au bout ! » Lorsque je lui demande comment vont ses enfants, elle répond : « c’est difficile pour celui qui passe l’examen de dernière année [au lycée], il n’arrive plus à se concentrer et je crains pour lui ». Elle ajoute : « j’ai dit à mes enfants : ce n’est pas la fin du monde ! Voyez, nous sommes en vie, nous sommes en bonne santé, et nous croyons en Dieu, c’est cela l’essentiel ».

Qu’écrire de plus ? A plusieurs reprises, on m’a dit « c’est ça, la vie à Jérusalem »...quelle vie ?

Denis Costil, 23 mai 2013

Lettre tirée du site : Defap


[1] UNRWA est un programme de l’Organisation des Nations unies pour l’aide aux réfugiés palestiniens dans le Proche-Orient, en matière de santé, d’éducation, d’aide humanitaire et de services sociaux).


- 04/05/2013, Première lettre :

DENIS COSTIL, OBSERVATEUR ‘EAPPI’ A JERUSALEM EAPPI : Ecumenical Accompaniment Program in Palestine and Israel

Israël et Palestine : deux pays qui tiennent dans un mouchoir de poche : du nord au sud, max 470 km, d’est en ouest 135km. Globalement, le territoire israélien se situe au nord, à l’ouest et au sud. Le territoire palestinien (dit West Bank, WB) prend place au centre - est, entre Israël et le Jourdain – on en reparlera, car ce territoire est divisé en plusieurs zones A, B, C. La zone de la vallée du Jourdain (la plus riche) est dite zone C, gérée entièrement par les Israéliens… La Palestine, telle qu’internationalement reconnue (frontières d’avant 1967), c’est 140 km du nord au sud et entre 30 et 60 km de large. Le programme EAPPI a localisé ses lieux d’observation et d’action aux endroits suivants :

- Tulkarem : principale source des problèmes : le mur – et l’accès des paysans aux terres cultivables.

- Yannoun : le village est entouré de colonies, zones construites le plus souvent sur le haut des collines, et habitées par des israéliens plus ou moins vindicatifs. D’où la nécessité d’une présence protectrice, en raison des incursions d’israéliens.

- Jérusalem : problème des colonies israéliennes autour de Jérusalem Est, c’est-à-dire dans la partie que les Nations Unies reconnaissent palestinienne, et corollaire : problème des démolitions de maisons palestiniennes, ou d’éviction de palestiniens. Problème de circulation des personnes (système des « check-points »). - Bethlehem : concentre tous les problèmes évoqués ci-dessus, et donc pas trop de priorités préalables -

-  Hébron : le principal problème est l’agressivité particulière de colons israéliens.

- South Hebron Hills c’est la dernière implantation d’EAPPI : le problème est d’être reconnu par la population : présence protective, visite des familles et des villages.

- Jayyous : ici aussi, présence protective.

Je dois dire que ces priorités sont établies à partir de ce qui est su de la situation, mais qu’elles peuvent changer chaque jour, entre présence protective (les colons, l’armée ou/et la police ont un comportement différent quand sont présents des « internationaux »), observations conduisant à intervention (appels téléphoniques aux associations ad hoc ou aux autorités locales ou internationales), rapports lors d’événements particuliers, présence auprès des familles… et rencontres de personnalités diverses, pour tenter de comprendre la situation.

C’est simple de dire que c’est compliqué »… pour exemple, il semble exister 101 situations administratives différentes pour les palestiniens, alors que les israéliens sont simplement citoyens d’Israël…

Jérusalem : équipe et travail

L’équipe dont je fais partie est localisée à Jérusalem. Elle est composée de cinq femmes et d’un seul homme, moi, déjà surnommé « le sultan de Jérusalem ».

Anna est une suédoise blonde aux yeux bleus.

Béatrice est finlandaise mais parait être d’ici, son père étant yéménite.

La couleur cuivrée de Chery traduit son origine philippine, et la colombienne Lorena parait espagnole plus que nature.

Enfin Patricia, irlandaise, est la seule à avoir dépassé la quarantaine !!! Tout ce petit monde cohabite dans une maison dont la terrasse donne sur une vallée (Jérusalem est constituée d’une série de collines et de vallées) et qui est constituée d’ une grande pièce au rez de chaussée : cuisine – salle à manger - salon, un réduit pour la machine à laver le linge, et à l’étage, deux grandes chambres partagées par les filles, et une chambre plus petite que j’habite seul, mais que j’ouvre volontiers pour que chacun(e) puisse skyper tranquillement sur le bureau .

Le travail est bien balisé :

Nous sommes présents trois fois par semaine, entre 4h30 et 7h30 du matin au principal check point entre Jérusalem et Ramallah ; 2000 personnes environ passent par ce check-point dans des conditions que je décrirai plus tard. Nous assurons aussi une présence à deux autres check-points plus modestes, une fois par semaine - je crois qu’on y passera plus de temps.

Nous assurons une « présence protectrice » en accompagnant les enfants d’une école située à l’extérieur du quartier où ils habitent – un israélien habite sur ce trajet, et crée, de temps en temps, des problèmes (jets de pierres, insultes…) – et ceux de l’école d’un camp bédouin.

Nous assurons aussi présence et aide auprès de deux groupes de bédouins, dont les tentes sont situées dans des zones de pâtures de plus en plus réduites par l‘avancée des terrains que colonisent les israéliens – les israéliens souhaitent faire partir tous les palestiniens de cette zone pour couper la Palestine en deux parties, nord – sud, entre Jérusalem et la mer morte.

Le vendredi est un jour très chargé : nous sommes présents dans la vieille ville de Jérusalem pour observer les contrôles ou les barrages de la police pour limiter le nombre de musulmans se rendant à la mosquée pour prier, et présents dans un faubourg sud pour les même raisons ; nous participons à diverses manifestations, par exemple celles du mouvement « Women in Black » ; ou celles des quartiers Sheikh Jarrah ou Silwan.

Je ne me rendais pas compte avant de venir ici de l’importance que peut avoir la présence d’un « international » pour limiter les violences dans tous ces cas ; ni l’importance que revêt aux yeux des palestiniens, ou des familles palestiniennes la simple présence régulière que nous assurons chaque semaine.

Ajoutez les entretiens que nous sollicitons de personnalités diverses, vous obtenez un emploi du temps bien chargé, d’autant qu’il faut se déplacer : en bus, quand c’est possible, ou avec Firas, notre taxi-driver préféré, qui sert aussi de traducteur, c’est absolument nécessaire dans certains cas ! Mais il faut bien qu’il gagne aussi sa croute, et il ne peut être là avec nous à chaque instant. Donc se déplacer prend un temps… certain, vu certains bouchons que nos grandes villes de France n’a pas à envier !

Et j’oublie les appels d’urgence : lorsque les services des Nations Unies, ou l’une ou l’autre association, nous appellent parce qu’il y a un coup tordu quelque part, cela prend une demi-journée. C’est arrivé quatre fois ces trois derniers jours : des appels pour des problèmes de démolitions ou d’éviction de maisons palestiniennes par l’armée et la police, ou encore, la tentative d’incendier une maison palestinienne…

Sans compter les divers types de rapports qu’il faut absolument rédiger car ce sont eux qui permettent aux organismes internationaux et organisations locales de décrire de façon factuelle les événements. EAPPI est réputé, j’ai déjà pu m’en rendre compte, pour être l’association qui passe le plus de temps sur le terrain. C’est ainsi que l’office central connait globalement au mieux les situations et les tensions, vu la répartition des lieux d’implantation. Voila.

C’est très simple de dire que c’est très compliqué !

C’est pourquoi cette première lettre n’entre pas dans les détails, mais décrit le travail et les conditions dans lequel nous l’exerçons. Les lettres suivantes permettront de décrire chacune des situations dans lesquelles nous sommes impliqués.

Merci de votre support, spirituel ou priant : J’ai besoin de tous !

Amicalement,

04/05/2013, Denis Costil

PS : Après un froid de canard - ou doit-on dire de chameau dans le désert, la nuit ? – accompagné de pluies et de vent, nous sommes entrés dans une période qui semble loin des conditions météo actuelles en France : la température ne descend pas sous les 25° mais ne dépasse pas les 32° ! Pour l’instant…

Lettre tirée du site : Defap

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